« Il n’y a aucun journaliste digne de ce nom qui puisse exister aujourd’hui en Arabie saoudite »

INTERVIEW. Lundi 26 décembre, Pierre Haski, journaliste Français de 65 ans, nous parle de la menace grandissante de la liberté de la presse. Interview d’un grand journaliste spécialiste de l’affaire Khashoggi.

Pierre Haski sur FranceInter (photo:gettyimage)

Le journalisme a toujours été un métier dangereux, surtout pour ceux qui le pratiquaient dans des pays à risques. Aujourd’hui, des journalistes du monde entier meurent pour leurs enquêtes qu’ils mènent. Mais alors en quoi l’affaire Khashoggi reflète le fait que la liberté de la presse soit menacée? Pierre Haski, journaliste clef de cette enquête, nous livre son témoignage.

Pensez-vous que le journalisme en Arabie Saoudite soit encore possible aujourd’hui ?

Non, il n’y a aucun journaliste digne de ce nom qui puisse exister aujourd’hui en Arabie saoudite. C’est un pays dans lequel le journalisme est au service du pouvoir ce qui explique d’ailleurs le départ de Jamal Khashoggi. Ce dernier, n’est pas un journaliste indépendant, il était au service du pouvoir, il était dans le premier cercle du pouvoir, conseillé du Ministre de l’intérieur de son pays. Mais il n’est que le reflet de l’incapacité à faire du journalisme quand on est en Arabie saoudite pour le moment, et je pense que ce n’est pas prêt de s’arranger.

Globalement, peut-on dire que votre demande d’enquête internationale a été entendue?

L’appel a eu un impact dans la mesure où il a été repris avec d’autres organisations défendants les droits de l’homme, notamment par le gouvernement Français qui a soutenu la demande d’une enquête internationale.

Il n’a pas été entendu par les principaux protagonistes c’est-à-dire la Turquie et l’Arabie Saoudite et encore moins par les États-Unis qui ne veulent pas d’une enquête internationale. Elle n’a pas lieu aujourd’hui et on voit bien qu’au contraire, Trump a décidé de soutenir le prince héritier Saoudien et donc de s’assoir sur les conclusions y comprit celles de la CIA qui font remonter la responsabilité de l’assassinat jusqu’au Prince.

Pensez-vous que certains pays utilisent cette affaire pour leur propre intérêt?

On voit bien que la Turquie qui est loin d’être exemplaire en terme de respect de la liberté de la presse, utilise l’affaire Khashoggi comme un instrument contre l’Arabie Saoudite, elle n’a aucune envie que cette enquête lui échappe, elle veut l’utiliser contre l’Arabie Saoudite.